Quelle est donc la ressemblance, ou plus précisément, le trait commun entre Élénore, petite fille de trois ans,
et… Winston Churchill, le «vieux lion» qui a tant marqué la politique anglaise… et bien au-delà ?
Écoutez plutôt :
Élénore, quelque peu «grassouillette» ainsi qu’elle le dit elle-même, se trouvait très occupée à déguster une belle part de gâteau à la crème…
Non sans une amicale malice, quelqu’un lui fit remarquer :
«Élénore, tu vas être encore un peu plus grassouillette…»
La réponse ne se fit pas attendre :
«J’assume»… !
Que répliquer à tant de paisible assurance ?
«J’assume»… et il était évident qu’elle avait bien retenu le terme, l’avait intégré dans son vocabulaire juvénile et l’utilisait à bon escient.
«J’assume»… et «grassouillette («un peu» !) je suis, et je me trouve bien ainsi…»
Elle apprendra et découvrira plus tard –l’éducation aidant– qu’assumer est essentiel, quand cette force d’âme s’exerce dans ce qui est juste, sage et bon, mais peut être hypothéquant pour soi et les autres quand ce n’est qu’entêtement.
«Il fut le plus grand…» Cette conclusion du général de Gaulle – parlant de W. Churchill, – souligne l’audace de la comparaison entre ce géant de l’histoire et la toute petite fille !
Et pourtant de nombreuses réparties et réflexions de ce terrible débatteur tendraient à légitimer la similitude.
Dans un florilège d’une richesse rare,
extrayons quelques «morceaux choisis» :
–à une députée qu’il vient de heurter en sortant, et qui proteste:
«Winston, vous êtes soûl !»
Churchill: «Madame, vous êtes moche, mais moi demain je ne serai plus soûl».
–A N. Astor qui lui assénait : «Si j’étais votre femme je mettrais du poison dans votre café», Churchill répliqua :
«Si j’étais votre mari, je le boirais».
–Au jeune reporter intimidé qui prend en photo le héros national pour ses 80 ans et qui balbutie: «Sir Winston, je suis vraiment enchanté de vous prendre en photo pour vos 80 ans et j’espère que je serai encore là pour vos 100 ans».
Réponse gentille de W. Churchill : «Jeune homme, vous me semblez en pleine forme et de bonne constitution. Je ne vois donc pas pourquoi ce ne serait pas le cas».
–Sur la diplomatie anglaise :
«Les Anglais ne fixent jamais une limite sans l’estomper».
–Ou encore:
«Je n’ai pas toujours eu tort ! L’histoire me donnera raison, d’autant que j’écrirai cette histoire moi-même».
Cet homme étonnant, d’un courage physique, notamment durant les guerres, qui le conduisit à mépriser la mort à plusieurs reprises, écrivain au prix Nobel, peintre…,
qui tel un roc se dressa face au déferlement d’Hitler et des forces nazies,
lutta sans faiblir et galvanisa son peuple aux heures les plus sombres, ouvrant la voie à la résurrection future de l’Europe…
Cet homme, descendant des ducs de Marlborough… déclarait que «la démocratie est le pire des systèmes à l’exclusion de tous les autres…» !
Il buvait quotidiennement beaucoup de champagne et de vins fins, de whisky…, fumait de gros cigares et méprisait le sport: «no sport», disait-il.
Il a vécu 90 ans!! sans jamais s’inquiéter de quelque sobriété que ce soit…
Peut-être aurait-il vécu cent ans en se contraignant davantage, mais il n’en avait cure !
Il assumait !
On peut admirer son courage et sa détermination, considérer qu’il fut, à un moment dramatique de l’histoire, un héros irremplaçable, l’homme du destin, et cependant,
ne pas fermer les yeux sur ses failles et défauts – en particulier ce qui avait trait à l’alcool –, ni sur des originalités de son mode de vie…
En toutes choses sa forte personnalité l’amenait à ignorer les jugements d’autrui et plus encore les «qu’en dira-t-on».
A tort ou à raison ? A raison en général sans aucun doute… mais parfois sans nul doute à tort !
Une réalité demeure: sa persévérance, son opiniâtreté furent déterminantes…
«J’assume» !
A une époque où tant de personnes ressemblent à des caméléons, changeant selon les influences des modes et des mœurs,
des intérêts et des opportunités,
où la faiblesse, voire la lâcheté, s’est érigée en «vertu», et ce en tant de domaines…
où beaucoup suivent les Panurge du moment,
il est bon d’entendre Elénore et W. Churchill dire «J’assume».
Ce doit être le langage, non pas d’orgueilleux, encore moins de bornés ou stupides,
mais,
– des parents qui aiment leurs enfants, ne cèdent pas aux sirènes de l’heure, et assument, avec les oui et les non qui s’imposent,
– des éducateurs qui le sont véritablement,
– des responsables, quels que soient le niveau et la sphère où s’exerce leur action,
– ou du simple citoyen qui, pleinement conscient de sa dignité d’homme ou de femme, veut se comporter, en toute occasion, qu’il soit vu ou non, avec rigueur et noblesse.
«J’assume !»
Depuis tant de siècles,
le message de l’Évangile appelle chaque homme et femme, quel qu’il soit, à bien «lever les yeux», à bien se situer dans ce monde changeant,
à construire sa vie sur des bases sûres,
et, pour lui-même et les siens, à «assumer»,
quels que soient les vents contraires et les cultures éphémères.