Ces petites structures coûtent peut-être de l’argent, mais elles apportent vraiment autre chose, moi, j’y crois!»
La rédaction de Regard d’Espérance a choisi ce mois-ci de s’entretenir avec un «enfant du pays» qu‘elle connaît de longue date, retraçant avec lui son parcours au fil de ses engagements et évoquant des aspects de l’actualité parfois brûlante de notre cité et de sa région…
Aussi sympathique que dynamique, on le sent animé d’une force tranquille qui l’amène à s’exprimer avec sérénité mais détermination quel que soit le sujet abordé…
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Pouvez-vous vous présenter brièvement ?
«J’ai 56 ans. Je suis né à Carhaix, j’y ai suivi ma scolarité maternelle, primaire puis le collège et le lycée. J’ai ensuite poursuivi mes études d’infirmier, la première année en région parisienne et les deux dernières à Rennes, parce qu’à l’époque, je jouais au foot et c’était plus facile de rentrer de Rennes pour jouer tous les dimanches que de Paris…
Après la période militaire, j’ai commencé en 1990 ma carrière professionnelle à l’hôpital de Carhaix et j’y suis toujours, infirmier au bloc opératoire.
Je suis également élu depuis 2001 à la ville de Carhaix avec Christian Troadec.
J’ai un enfant, mais je considère toujours que j’en ai trois, puisque j’ai élevé en partie les deux jeunes enfants de mon épouse quand nous nous sommes rencontrés. Je dis donc aussi que j’ai quatre petits-enfants.»
Que représente pour vous Carhaix et sa région?
«Ma mère est de Spézet et mon père était de Laval, mais ils se sont rencontrés à Carhaix. Il était jockey et travaillait chez Jean Rohou, ancien maire de la ville, conseiller régional et départemental bien connu… Après ses débuts de carrière sur Carhaix, nous étions partis à Loudéac. Malheureusement, à l’âge de 6 ans, j’ai perdu mon papa… Suite à ce décès, toute la famille est revenue vivre à Carhaix, ma maman et mes deux petits frères. Et nous y sommes toujours restés.
Carhaix, c’est donc l’endroit où je suis né, où j’ai grandi, où j’ai construit ma vie professionnelle et ma vie familiale puisque c’est ici aussi que j’ai rencontré mon épouse, originaire de Plévin.»
Vous faites partie du conseil municipal de la ville de Carhaix depuis 22 années. Qu’est-ce qui vous a poussé à vous investir dans la politique de la cité, et qu’est-ce qui vous pousse à poursuivre cet engagement tant d’années plus tard? En France, de plus en plus d’élus «jettent l’éponge»… éprouvez-vous une lassitude après ces années d’engagement au service du territoire?
«En 2001, j’étais président du club de badminton, et aussi administrateur du festival des Vieilles Charrues avec Christian Troadec qui en était le président. Quand il a commencé à constituer son équipe pour les élections municipales, il m’a sollicité en tant que sportif et représentant du monde associatif, j’étais aussi membre de l’Office des sports. J’ai été un peu surpris, la discussion n’a duré que quelques minutes… j’ai accepté sans trop savoir à quoi je m’engageais…
L’idée était plutôt de préparer une équipe pour le prochain mandat dans six, sept ans… Mais finalement, nous avons été élus. Nous nous sommes donc réparti les différents postes en fonction des compétences… On m’a dit: toi, tu prends le sport! Ensuite nous avons continué notre aventure. Un mandat, c’est vrai que c’est un peu court, donc on se relance forcément.
Un deuxième mandat permet de faire aboutir des projets initiés… et nous avons eu la chance de remporter à chaque fois les élections.
Personnellement, je n’ai jamais ressenti de lassitude. J’ai réussi à concilier ma vie professionnelle avec ma vie politique et ma vie familiale. Même s’il faut parfois «jongler» entre les gardes du bloc opératoire, les réunions et la vie de famille…
On a en permanence des projets, certains se concrétisent, d’autres n’ont pas encore abouti… Pour moi, cette motivation existe toujours: on a envie d’arriver à la finalité de ce que l’on a essayé de mener pour le territoire… Et finalement, on arrive à un 4e mandat qui va se terminer en 2026, cela fera 25 ans! Je pense que c’est déjà un beau parcours… Je ne sens donc pas cette lassitude de la vie politique. Maintenant, on est à mi-mandat, on verra pour les prochaines étapes!»
Vous êtes «2e adjoint», en charge des sports et des espaces verts… mais aussi 5e vice-président de Poher Communauté chargé de l’Enfance, de la Jeunesse et des Sports. Cela exige un investissement personnel de temps et d’énergie; que représente pour vous cet engagement? Que recouvre ce rôle?
«Les espaces verts sont effectivement une partie de mon activité, nous travaillons avec la responsable du service sur les projets d’aménagement paysager de la ville. Ils sont ensuite validés en bureau municipal avant d’être mis en œuvre par l’ensemble des équipes qui compte une douzaine d’agents. Aujourd’hui les méthodes de travail sont complètement différentes d’il y a quelques années, nous sommes passés en «zéro phyto» sur toute la ville, avec des modes de gestion différenciée des espaces, etc. Il a fallu expliquer ces changements à la fois aux agents et à la population. Fini, les désherbants chimiques et la débroussailleuse partout… Il faut donc accepter parfois le pissenlit qui pousse… et se rappeler qu’il est, lui aussi, une fleur!
Nous avons réussi, je pense, grâce aussi à la qualité des responsables, Jacques Raoult puis Cécile Thépault-Cojean maintenant, à faire avancer les choses dans le bon sens et selon les règles environnementales qui nous sont imposées…
Je suis également en charge du service des sports et vice-président de l’Office des sports de Carhaix qui pilotent toute la politique sportive de la ville en relation avec les 50 associations existant sur le territoire. Ensemble, nous organisons les événements sportifs et tout le monde sait qu’à Carhaix ils sont très nombreux! Il faut donc très souvent valider des organisations, des événements, des autorisations, etc.
Concernant Poher Communauté, la vice-présidence à l’Enfance, à la Jeunesse et aux Sports, m’amène à chapeauter tout ce qui est Centre de loisirs, Maison de l’enfance, réseau de la petite enfance, la ludothèque, l’espace aqualudique, le vélodrome de Cléden-Poher, etc. Au quotidien, la responsable de service, Ophélie Guyomard, gère ces structures, mais pour les décisions politiques concernant leur fonctionnement (avec la Commission enfance jeunesse et sport qui fait remonter les diverses propositions en bureau communautaire), il me faut compter pour ces deux fonctions, une bonne vingtaine d’heures en moyenne par semaine.
Parmi ces obligations –que moi je ne ressens pas comme telles– figurent les temps de présence sur les événements, à la rencontre des organisateurs que l’on n’accompagne pas seulement pour les préparations… C’est se rendre sur une compétition de rugby, un tournoi de football… Organiser tout cela représente beaucoup de travail pour les bénévoles, c’est important d’être présent et d’échanger avec eux à ce moment-là. Avec mes collègues adjoints et l’ensemble de la Commission, nous nous partageons les différentes tâches pour être présents le plus possible dans tous ces événements…»
Quelles sont les plus grandes réussites ou fiertés de votre «vie d’élu», et quels seraient au contraire vos regrets?
«Les fiertés sur la partie sportive, c’est d’avoir pu construire ce magnifique équipement à la Vallée de l’Hyères, qu’est le Centre équestre municipal. Et d’avoir réussi à monter ce projet pédagogique avec les écoles pour permettre aux enfants de faire sur leur scolarité deux cycles d’équitation. Nous nous étions dit que si les communes en bord de mer arrivaient à offrir aux enfants des activités nautiques pendant des cycles de 6, 7 semaines, pourquoi ne pourrions-nous pas proposer quelque chose aussi? En 2004 ou 2005, un second centre équestre privé s’était monté sur la commune, nous en avons profité pour concrétiser ce projet en partenariat avec l’Éducation Nationale. Et cela fonctionne très bien depuis maintenant une bonne quinzaine d’années.
Des milliers d’enfants de CE2 et CM2 ont ainsi eu l’occasion de découvrir et pratiquer cette activité trop onéreuse pour le budget de certaines familles…
Outre le centre équestre, nous avons développé l’équipement de la Vallée de l’Hyères, avec l’installation de plusieurs nouvelles structures sportives en partenariat avec la ville: le golf, le parc «Karaez Adrénaline» et la mise en place de circuits de randonnée, d’orientation, de VTT et maintenant celui de trail labellisé.
De l’autre côté de la cité, a été réalisé aussi tout le complexe de Kerampuilh avec la maison des jeux d’adresse que les associations de pétanque, de boules, de palets utilisent. S’y trouve aussi le terrain synthétique qui représentait un gros budget pour la collectivité, il est le seul dans tout le centre de la Bretagne. Mais aujourd’hui, nos clubs de foot comptent autour de 500 adhérents…
Pour le rugby, quand nous avons pris la municipalité, il n’y avait qu’un tout petit terrain sans éclairage et de petits vestiaires; maintenant il dispose de plusieurs terrains éclairés, etc. L’ensemble de la zone sportive de Kerampuilh a ainsi été amélioré.
Un autre équipement de la ville a également été complètement réhabilité: c’est le stade Charles Pinson que nous avons refait à neuf avec des nouveaux locaux pour les clubs et la salle Karaez Park…
Enfin, la salle omnisports avec le dojo a également été entièrement refaite…
Nous espérons maintenant que la Région ne tardera pas à inaugurer son gymnase. Les travaux sont actuellement un peu arrêtés, mais cela devrait se régulariser.
Aujourd’hui, il y a un manque pour les sports en salle, nous jonglons avec les plannings…
Et c’est là mon plus grand regret: ce palais des sports… je pensais qu’on l’aurait déjà!
La Communauté avait voté la prise de compétence, les budgets étaient quasiment bouclés, l’architecte était trouvé…
Même si j’ai été pendant de nombreuses années adhérent aux Vieilles Charrues et membre de son Conseil d’Administration, je regrette leur positionnement à ce moment-là… Ils ne voulaient pas trop de l’équipement à cet endroit, pensant que cela allait bloquer un peu leur festival… Et puis en plus, malheureusement le COVID est arrivé…
Je pense que sans ce blocage, on aurait déjà un équipement à proposer aux Centre-Bretons et à nos associations. En tout cas, nous relançons ce projet dans le cadre du Breizh Park. Nous espérons réussir à construire cet équipement structurant qui sera sportif et culturel, en partenariat avec le Glenmor et le Centre de congrès. Nous pourrons en dire un peu plus dans quelques semaines…»
Carhaix a accueilli le championnat de France de Cross, il y a quelques semaines (mais aussi une étape du Tour de France, il y a quelques années), quel travail d’organisation cela représente pour vous et vos équipes?
«Un événement national de ce genre représente beaucoup de travail… Pour finaliser de tels projets, nous constituons des commissions, des groupes de travail qui réunissent des élus, des techniciens de la ville et des associatifs, nous créons ce qu’on appelle des comités de pilotage comprenant différents adjoints: à la culture, à la voirie, ou d’autres secteurs et les finances aussi forcément! Ensuite, nous faisons des présentations au bureau municipal pour validation par l’ensemble des collègues. Nous sommes amenés à prendre des délibérations au Conseil, le plus souvent pour des subventions que l’on doit apporter ou des conventions de mise à disposition d’équipements avec différents partenaires… Ce sont des documents qui doivent passer en Conseil.
Mais nous avons des équipes bien rodées et elles sont fières de pouvoir faire autre chose que le travail quotidien d’entretien ou de mise en valeur de la ville. Ils sont toujours contents de participer à des événements qui d’ailleurs, sans eux, ne pourraient pas avoir lieu.
Nous nous appuyons évidemment sur les clubs locaux. Sans un club local moteur, rien ne serait possible non plus: difficile d’organiser un événement sans s’appuyer sur leurs compétences!
Pour les championnats de France, c’est beaucoup de visioconférences avec la Fédération, beaucoup de réunions, de validations… 80% du travail est fait par le club, ses présidents et ses bénévoles, nous sommes surtout source de validation de certaines décisions, d’appui financier via les subventions, de soutien aussi avec les différents partenaires, un peu de sponsoring également et du mécénat… Et ensuite l’aide concrète à l’organisation de l’événement en donnant l’instruction au chef de service qui le relaie aux équipes…
Le « France » a été une réussite extraordinaire. Il en avait été de même pour le Tour de France! Nous «re-candidatons» d’ailleurs régulièrement. Et nous venons de le faire à nouveau espérant avoir le Tour de France pour les 70 ans de Bernard Hinault… Si nous ne l’obtenons pas là, ce sera peut-être dans 2 ou 3 ans: nous aimerions vraiment, après 2014, avoir de nouveau une étape du Tour de France… Mais une étape de départ, parce que budgétairement, une arrivée, c’est un peu onéreux!»
Les solutions de garde d’enfants sont souvent problématiques du fait du manque de places en crèches ou des conditions d’accueil. En tant que vice-président en charge de l’enfance, comment jugez-vous l’offre sur le territoire ?
«La CAF qui considère notre territoire en une seule entité, estime que l’offre y est satisfaisante. L’on sait pourtant que si sur certaines communes le nombre d’assistantes maternelles est suffisant, ce n’est pas le cas pour d’autres… Et l’on peut comprendre que des familles soient réticentes à faire des kilomètres pour aller déposer leurs enfants dans une autre commune…
Se pose également le problème du nombre important de départs à la retraite prévu sur le territoire dans les années à venir… Nous travaillons donc sur des formations, des salons, des forums petite-enfance pour mettre en avant tous ces métiers et essayer d’attirer des jeunes à s’y installer… La commune porte des projets de création de MAM via des subventions, elle finance aussi de manière importante la crèche Galipette et la halte accueil. Mais aujourd’hui, Galipette a près de 7 à 8 mois d’attente et le Centre de loisirs refuse 20 à 25 enfants tous les mercredis…
Nous travaillons donc avec le CLAJ, la DDCS et la PMI sur le projet d’une seconde structure d’accueil: un ALSH bilingue parce que beaucoup des parents qui scolarisent leurs enfants dans les écoles bilingues aimeraient avoir un accueil bilingue aussi les mercredis.
Le fait d’avoir deux sites permettrait d’accueillir les enfants que l’on refuse aujourd’hui. Et un autre projet va aussi nous permettre de récupérer des espaces (les surfaces de mètres carrés pour accueillir dans de bonnes conditions les enfants conditionnent l’obtention des agréments). En effet, le SESSAD va quitter des locaux de la Maison de l’enfance pour intégrer les nouveaux locaux de l’IME – PMS.
Il faut des solutions pour accueillir mieux et plus. Et ne pas laisser de familles dans la difficulté les mercredis et les vacances.»
Quelle est l’actualité dans vos champs de compétences, et quels sont vos projets pour les années à venir dans ces domaines? Quelles sont les perspectives de réouverture du gymnase du lycée, et quels sports offrira-t-il? Qu’en est-il du projet de «Palais des sports de Carhaix»?
«La livraison des cours de tennis extérieurs réhabilités est d’actualité (près de la piscine NDLR). Ils étaient en béton, ils seront maintenant en gazon synthétique. Une convention de gestion de ces cours entre la ville et le club va permettre aux pratiquants licenciés ou non d’en bénéficier.
Le gymnase du lycée est un gymnase scolaire qui n’a pas de gradins, mais il va permettre tous les entraînements des clubs de basket, de hand, de futsal, de volleyball qui aujourd’hui ont lieu à la salle omnisports ou au gymnase de Saint-Trémeur. Les championnats au quotidien y fonctionnent bien aussi. Par contre, la capacité d’accueil est trop limitée pour l’organisation d’événements plus conséquents comme il y a quelques semaines le championnat du Finistère de Judo. Le Palais des sports en projet permettra aux associations de réaliser ces événements via leur Ligue ou leur Fédération et d’accueillir sur Carhaix des compétitions de gymnastique, de judo, de futsal, de tennis de table, etc.
Et l’idée de cet équipement, c’est aussi de signer des partenariats avec des clubs pros qui sont à une heure de Carhaix et qui pourraient venir y faire valider un match de coupe, de championnat, ou jouer un match amical…
Aujourd’hui, ce sont nos populations qui se déplacent pour aller voir du hand à Brest, du volley à Saint-Brieuc, du basket à Quimper ou à Landerneau, etc.
En délocalisant ainsi un ou deux événements sportifs par mois sur 6, 7 mois de l’année, en y ajoutant ce que nos clubs vont faire et de l’événementiel non sportif (du culturel, des concerts, des salons, des congrès, et même des concours administratifs) l’équipement peut être rempli quasiment tous les week-ends!
Nous travaillons aussi en ce moment sur le projet d’une piste d’athlétisme de 400 mètres à Kerampuilh avec la Fédération française d’athlétisme et la Ligue dans le cadre du centre permanent d’entraînement des équipes de France d’athlétisme puisque l’on vient d’apprendre qu’on serait «cross sélectif» des équipes de France pour les championnats d’Europe au mois de novembre. La Ligue de Bretagne a candidaté et la Fédération nous en donnerait la labellisation (pas pour toutes les catégories puisque c’est partagé entre plusieurs communes, mais pour les seniors hommes, donc la course élite homme et les espoirs femmes, je crois). Deux courses qualificatives pour les championnats d’Europe, plus peut-être les premières équipes de France à s’entraîner sur le magnifique parcours à Kerampuilh! Tout cela est positif pour l’ALCP!»
Que représente pour vous personnellement le sport? Les ans passant, conservez vous une pratique sportive… ou tout au moins un entretien physique régulier?
«Le sport est une école de la vie comme la culture, la lecture, la musique, etc. Moi, j’ai baigné dans le sport, mes frères faisaient du vélo, j’ai toujours pratiqué des activités sportives. Maintenant j’essaye, entre toutes les casquettes et le métier, de faire au moins une fois par semaine, de la course à pied ou du VTT, plutôt du VTT d’ailleurs, de la marche aussi et un peu de ski l’hiver. Un peu d’activité régulière donc, mais plus de compétition: juste essayer de garder la ligne et la forme!»
Quels conseils donneriez-vous aux jeunes quant à la pratique sportive et à l’hygiène de vie? Et… aux moins jeunes?
«Le sport fait partie d’une hygiène de vie. Il permet aussi des rencontres, dans les clubs des amitiés se lient… Pour ceux qui veulent se mesurer à d’autres, les compétitions permettent de se «challenger»…
Si tout le monde pratiquait un minimum d’activité physique, je pense que nous en verrions le bénéfice aussi en termes de santé publique. Je suis pour le remboursement par la Sécurité Sociale de cours d’activité physique. Je trouve que le sport-santé c’est bien, et je pense que nous allons vers là, plutôt que de donner des comprimés… Si nous pouvions, avec des éducateurs sportifs, prendre en charge certaines personnes, cela leur ferait autant de bien. Mon fils est enseignant en activité physique adaptée, il travaille avec des enfants autistes, il a aussi pris en charge des personnes âgées, etc.
Aujourd’hui, il faut développer de nouveaux métiers. Il est possible de s’installer en libéral, de travailler avec des kinés, des ergothérapeutes, des médecins, dans des cabinets pluridisciplinaires, prendre en charge et être rétribué et prévoir des remboursements pour les patients…
Il faut aller dans ce sens-là, plutôt que vers la chimie et les molécules, pour certaines pathologies en tout cas, c’est une problématique de santé!
Les conseils pour les jeunes et les moins jeunes: inscrivez-vous dans des clubs ou pratiquez une activité personnelle, il n’y a pas d’âge pour pratiquer des activités. D’ailleurs, à l’Office des sports, dans les cours de gymnastique que nous appelons «gym senior», il y a plus d’une centaine d’adhérents. Les clubs, que ça soit de pétanque, de marche, ont beaucoup de pratiquants: on voit bien que les gens ont besoin d’aller faire une activité. Il faut qu’ils trouvent sur le territoire des structures auxquelles on donne les moyens d’exister et de pouvoir les accueillir, jeunes et moins jeunes.»
Le Centre-Bretagne bénéficie d’un riche maillage associatif, notamment dans le domaine des sports. Connaît-il, comme d’autres lieux, une «crise du bénévolat»?
«Beaucoup de clubs reposent sur l’engagement de quelques personnes. Et s’il arrive à ces «militants» de s’essouffler ou d’avoir un peu de mal à continuer, certains clubs pourraient effectivement être mis en sommeil ou disparaître. Je l’ai très peu connu depuis 2001. Mais actuellement, un club est mis en sommeil, et j’en suis un peu triste parce que c’est le club de badminton qui existait depuis longtemps et dont j’ai été le président durant de nombreuses années.
On espère qu’il pourra repartir!
Pour un engagement au quotidien, le bénévolat est plus difficile à trouver, les jeunes ont peut-être un peu moins de facilité à s’engager… par contre, pour l’événementiel, en tout cas sportif, nous pouvons toujours mobiliser beaucoup de monde sur le territoire de Carhaix: s’il faut 500 bénévoles, il y en aura 1500 sur la liste, sans difficulté!
C’est l’engagement de fond qui pose davantage problème… La lourdeur de la tâche, l’ampleur des responsabilités que l’on doit assumer, peut faire peur… Mais je suis assez optimiste!»
Vous avez fait, dans votre jeunesse, du scoutisme au groupe «Ar Menez» du Centre Missionnaire, quel souvenir en gardez-vous? Qu’apporte aux jeunes le scoutisme?
«Je garde de très bons souvenirs de ma période scoute. J’ai été scout à peu près de sept à quinze ans. Je croise souvent d’anciens copains scouts, on se raconte un peu nos histoires…
Le scoutisme est une école, une école de la vie… Il permet au jeune de comprendre certaines choses et d’être orienté sur certaines activités, souvent sportives… Mon attachement au sport vient peut-être de toutes ces activités que j’ai pratiquées dans le cadre du scoutisme à cette période-là. On y a fait beaucoup de choses que les réglementations, qui ont changé, n’autorisent sans doute plus aujourd’hui!
Mais les valeurs du scoutisme, elles, n’ont pas changé. Et lorsque l’on a rencontré le scoutisme dans sa jeunesse, on en garde quelque chose sur sa vie personnelle, on a toujours une image de quelque chose de positif et je pense qu’on s’en sert. En tout cas, moi, je m’en suis toujours servi dans ma vie au quotidien et j’en garde un très bon souvenir!»
De par votre profession et vos engagements, vous êtes un observateur privilégié de l’hôpital de Carhaix. Quel bilan dresseriez-vous de la fusion avec le CHU de Brest près de 15 ans plus tard?
«Personnellement, je pense que le bilan est positif, dans le sens où le CHU nous a apporté beaucoup de moyens matériels et des compétences professionnelles.
Des chirurgiens qui travaillent à la fois sur Brest et sur Carhaix ont pu développer un certain nombre de nouveautés…
Les consultations aussi se sont bien développées sur le site. Les patients n’ont plus besoin d’aller loin pour certaines spécialités, il est possible d’obtenir quasiment tous les types de consultations sur l’hôpital.
Par contre, petit bémol: on a toujours l’impression que la fusion s’est faite par obligation pour l’hôpital de Brest. Carhaix est un des sites du CHU, qu’ils se sentent un peu obligés de «faire fonctionner», et cela se ressent particulièrement dès que surviennent des difficultés…
C’est difficile à vivre pour les soignants et pénible aussi de devoir se battre sans arrêt, expliquer, argumenter en faveur de notre établissement.
Un anesthésiste en moins ici, par exemple, c’est 40% de l’établissement qui est déstabilisé, parce que les blocs, la chirurgie, l’ambulatoire, les soins continus ne fonctionnent pas… et quand on sait qu’il y a 40 ou 50 anesthésistes sur Brest, nous avons du mal à comprendre pourquoi on n’arrive pas à sortir un planning où, en cas de manque, l’un d’entre eux pourrait descendre juste pour compenser, le temps de trouver un intérimaire… Si on enlève un anesthésiste à Brest, à la Cavale Blanche ou à Morvan, c’est sûr que cela déstabilisera une ou deux salles d’opération mais pas autant l’établissement…
Ici, je vois mes collègues, tout le monde s’investit vraiment pour faire fonctionner au mieux l’établissement. Nous sommes malheureux quand une salle ne fonctionne pas ou qu’un médecin est absent, nous vivons dans la hantise de l’image négative véhiculée, avec «l’épée de Damoclès» de la fermeture…»
Effectivement certains secteurs d’activités comme l’obstétrique et la chirurgie sont régulièrement menacés… Qu’en est-il aujourd’hui, selon vous?
«Aujourd’hui il y aurait plusieurs anesthésistes à avoir signé des contrats, ce qui est positif…
Mais je serais rassuré s’il y avait une plaque à l’entrée de l’hôpital –signée de je ne sais pas qui– sur laquelle était gravée la promesse du maintien des services. J’aimerais qu’avant la fin de ma carrière, cela soit institutionnalisé! Depuis le début, quand je suis rentré à l’hôpital, on m’a dit: l’hôpital fermera, tu n’y feras pas ta carrière. Je l’y ai faite!
Le Centre Bretagne mérite cet hôpital et mérite ces services. La population existe et elle continuera à exister, elle aura besoin d’avoir un service de chirurgie, d’urgences, une maternité et qu’on lui garantisse que, quelle que soit la difficulté médicale, ces activités seront toujours maintenues. Tout le monde serait rassuré, nous aurions moins de mal à attirer et garder le personnel sur l’établissement.»
La menace est parfois venue d’une volonté politique affichée (des administrations d’État) comme lors de la fameuse lutte de 2008… parfois peut-être par une volonté institutionnelle plus insidieuse… aujourd’hui il semble que la menace vienne également d’un manque structurel de personnel soignant (l’exemple fâcheux du CH de Guingamp nous en montre les conséquences néfastes). Comment analysez-vous la situation actuelle ?
«Il faut former des jeunes du territoire dans ces métiers et rendre le territoire attractif. Nous les élus, avons là un rôle à jouer… Je pense que pour les territoires ruraux en tout cas, il faudrait des « passerelles » pour que l’on puisse avoir des médecins à venir à temps partiel sur l’établissement…
Mais il y a des spécialités qui fonctionnent bien, et je pense que ça fonctionne si le responsable y croit et s’investit. C’est le cas pour la gastro-entérologie et l’orthopédie parce que dès 2008, les professeurs chefs de service sont venus personnellement prendre des gardes et faire fonctionner l’unité et ses équipes. Le partenariat avec Morlaix sur le viscéral fonctionne bien aussi. A la maternité, nous avons la chance d’avoir eu sur Carhaix, les anciens chefs de service des maternités de Brest et de Quimper. Qui aurait dit il y a quelques années, que ces deux médecins seraient venus finir leur carrière à l’hôpital de Carhaix ! Ils ont beaucoup apporté à l’établissement.
Le service d’anesthésie n’a jamais bien fonctionné. On n’a jamais eu de volonté de la part des chefs de service et je leur en veux, depuis cette période-là, de ne pas s’être investis. Je pense que si nous en avions eu un ou deux à « tourner » comme le font toutes les autres spécialités, nous n’en serions pas là!»
Le CHU de Brest-Carhaix a un rôle essentiel à jouer dans la pérennisation et le développement de l’hôpital de Carhaix de par ses missions d’organisation et de planification de l’offre de soins dans ses établissements, mais aussi par ses missions de formation des futurs médecins et l’élaboration de leur parcours de stage, etc. Cependant, il semble que, comme nous l’évoquions dans le précédent « Regard d’Espérance », face à la conjoncture actuelle (du manque de médecins et d’infirmiers notamment), le CHU aura du mal à résoudre seul les problèmes que rencontre l’hôpital. Il faudra probablement des actions de concert entre le CHU et les collectivités locales pour construire une véritable politique d’attractivité du personnel médical et soignant ; comment voyez-vous cette collaboration ? Qu’en est-il aujourd’hui, et que devrait-elle être selon vous ?
«Les partenariats existent et devraient continuer à se développer…
Au niveau du pays COB, la commission santé, présidée par Jean-Pierre Hémon, travaille avec toutes les instances concernées, le CHU, les représentants des collectivités dont Christian Troadec qui est membre du Conseil de Surveillance de l’hôpital, Alain Guéguen aussi…
Mais le message est parfois difficile à faire passer… Nous avons l’impression d’être pilotés par une Direction Générale qui a du mal à s’imprégner des problématiques locales…
Il faut vraiment que ceux qui nous dirigent comprennent l’importance et l’intérêt de l’établissement sur notre territoire…
Les politiques ont fait en sorte que le territoire puisse s’inscrire en ZRR (Zone de revitalisation rurale), ce qui donne des avantages (défiscalisation, etc.) aux médecins libéraux lorsqu’ils s’installent: pourquoi ne pas envisager des aides semblables pour les médecins et autres professionnels hospitaliers ?
L’école d’aides-soignantes récemment créée fonctionne très bien, pourquoi ne pas s’en inspirer pour d’autres formations médicales ? Ce peut être une piste à étudier pour remédier à la pénurie d’infirmières en Centre Bretagne…
La collectivité construit sa Maison de santé en ville. Elle réhabilite aussi des locaux pour l’installation d’un nouveau cardiologue et il semble qu’un certain partenariat avec le CHU pour quelques missions et des prises de garde est à l’étude… La question pourrait peut-être se poser pour des médecins ou autres professionnels de la future Maison de santé…
Je ne crois pas trop à de nombreux médecins qui viendraient s’installer pour faire fonctionner l’hôpital. Mais je crois aux partenariats entre les différents Centres Hospitaliers de Morlaix, Landerneau et Carhaix, avec des équipes qui peuvent tourner, venir une journée ou deux à tour de rôle…
L’hôpital a tout ce qu’il faut pour bien fonctionner. Nous avons un établissement qui est plutôt bien conçu. Les patients apprécient l’accueil et la prise en charge qui n’ont rien à voir avec ceux des plus grandes structures, surtout à la maternité…
Ces petites structures coûtent peut-être de l’argent, mais elles apportent vraiment autre chose,
moi, j’y crois!»
Le maire, Christian Troadec, a été pour un temps contraint par des ennuis de santé de se mettre en retrait. Comment avez-vous vécu cette réorganisation temporaire forcée de l’équipe municipale? Qu’en est-il des perspectives quant à son retour aux commandes de la politique de la cité ?
«Nous avons été surpris et affectés par ses problèmes de santé. Il est le maire depuis 2001, plusieurs collègues de la municipalité et moi-même travaillions avec lui depuis cette période…
Nous avons dû prendre en main les choses « au pied levé » puisqu’il fallait bien que dans les deux collectivités, tout continue à fonctionner ! Nous nous sommes réparti les tâches à plusieurs adjoints, Serge Couteller, Daniel Cotten… Jacqueline Mazéas, première adjointe et première vice-présidente, s’est beaucoup investie, nous lui sommes reconnaissants pour sa disponibilité et ses compétences. Nous avons continué à échanger régulièrement avec Christian Troadec par mails, SMS, ou appels téléphoniques et l’avons toujours associé. En évitant cependant de trop le solliciter pour préserver sa santé, surtout les premières semaines, nous nous sommes organisés pour sélectionner les questions, attendre les réponses… Nous n’étions que quelques-uns à pouvoir le contacter quand nous avions besoin de son aval ou de son expertise pour des dossiers et des questions importantes. Naturellement, nous avons présidé des conseils, moi-même ou Jacqueline Mazéas… avec la bienveillance des oppositions, cela s’est plutôt bien passé ! Aujourd’hui, après quelques semaines en rééducation à Roscoff, Christian a repris partiellement le travail de dossiers en présentiel. Il doit poursuivre des examens médicaux sur les mois de mai et juin. Mais nous espérons son retour après l’été sur des réunions, des conseils, souhaitant qu’il se porte bien et puisse reprendre peu à peu toutes ses missions… Nous avons hâte qu’il revienne!»
Comment voyez-vous l’avenir de Carhaix et du Poher dans les prochaines années?
«Les idées et les projets, les dossiers et les chantiers qui les concrétisent, ne manquent pas!
Je suis optimiste, parce que nous voyons bien que l’arrivée de la 2×2 voies « booste » les contacts avec les entreprises, leur implantation et le développement d’infrastructures. On sait que quand tout sera terminé, on va gagner facilement 40 à 45 minutes en empruntant l’axe central entre Brest et Rennes plutôt que les voies sud et nord. Notre territoire, Rostrenen, Châteauneuf-du-Faou vont vraiment tirer bénéfice de cet atout. Il faut que nous parvenions à maintenir des structures pour accueillir les gens qui s’installent, donc développer des lotissements, des structures d’accueil, des centres de loisirs, etc. Nous avons les capacités pour le faire, de nouvelles zones devraient sortir de terre, à la Métairie Neuve par exemple, nous devrions obtenir un autre échangeur pour desservir ce secteur…
Le territoire a des atouts ! Il faut s’y préparer !»