«Êtes-vous esclave de votre corps?»

Cette question peut paraître indiscrète, voire déplacée !

Et cependant elle souligne une réalité que subissent bien plus de personnes de tous âges que nous pourrions le penser! Je ne veux pas dans cet éditorial parler des souffrances et handicaps qui altèrent parfois considérablement l’existence de beaucoup d’êtres humains. Pour eux, la compassion et l’aide s’imposent. Mais ce que j’aimerais aborder, c’est un autre aspect de la prédominance du corps dans les pensées et le comportement de nombre de nos contemporains.

Combien sont préoccupés par la mode–les modes–et voudraient ressembler peu ou prou aux «mannequins», «vedettes» et aux personnalités que l’actualité met en évidence, et qui règnent dans les magazines, les émissions télévisées et autres lieux qui donnent «le ton» au grand public…

La dictature du corps est redoutable et peut se révéler hypothéquante, parfois tyrannique.

Dictature? ou idolâtrie!

Selon les personnes et les situations, l’une ou l’autre prédomine.

Ainsi on parle de plus en plus d’anorexie, et quand elle atteint la pensée, elle est dangereuse.

J’ai connu, parmi des personnes relativement proches, le cas d’une jeune fille qui, à force de se restreindre, de calculer et de diminuer sa nourriture est devenue si mince ou maigre qu’elle a, non seulement compromis sa santé physique, mais également son équilibre psychique et a failli être hospitalisée en psychiatrie…

Tous n’en arrivent pas là!

Mais le «mal» est plus répandu que d’aucuns ne l’imaginent.

La dictature du corps peut s’exercer, certes, en fonction de la mode, ainsi que noté dans cet article, mais aussi par la gourmandise, la boulimie, etc.

Le corps humain est une merveille dont on ne connaît pas encore toute la complexité et les multiples interactions, mais il doit demeurer à sa juste place, celle d’un extraordinaire «outil» qui fait partie de notre être tel que l’a créé le Créateur de toutes choses.

Mais il ne doit pas dominer l’âme, ni l’esprit.

Au contraire, il doit leur être soumis!

Il faut accorder à cette expression visible de notre personne toute l’attention, les soins, l’entretien qui lui sont nécessaires.

Le délaisser amènera de cruels mécomptes…

La réflexion du sage est un avertissement plus que pertinent:

«Méprisez votre corps, il vous le rendra bien!»

La parole déterminée de l’enfant de deux à trois ans, auquel des conseils de modération quant aux friandises et autres aliments attirants avaient été donnés, est à méditer:

«J’obéis mon corps», a-t-il soudain déclaré.

L’expression peut prêter à sourire… mais la volonté de ce très jeune garçon de se discipliner et de ne pas s’abandonner à «ses envies» est une leçon pour tous.

Combien face à l’alcool, la drogue ou au tabac, etc., ou à telle passion, tout comme aux excès du manger et du boire, devraient, comme Gwendal, imposer à leur «corps» l’obéissance et la mesure.

«On est esclave de ce qui a triomphé de soi» dit la Bible, et cela est vrai en bien plus de domaines que nous ne pouvons citer dans ces quelques lignes…

Mais chacun peut réfléchir et se demander s’il n’est pas «devenu esclave» de quelque habitude, de quelque tradition, de réflexes… de ce que pensent «les autres», ce «qu’en dira-t-on» qui aliène tant d’existences…

Non pas qu’il faille rejeter ou mépriser les sages conseils et les exhortations reçus dès l’enfance ou l’expérience acquise par la suite, mais en examinant toujours leur pertinence, leur utilité, leur bien-fondé.

Nous sommes soumis, inconsciemment ou non, à de multiples sollicitations venant de toutes parts: publicités, slogans, injonctions diverses, etc. Il faut savoir comme le disait une femme âgée, «en prendre et en laisser».

Notre époque, avec ses moyens techniques si sophistiqués et parfois envahissants, nous expose à tant de propositions, qui sollicitent notre être entier, la vue, l’odorat et tous nos sens, qu’elle nous oblige à être sur la défensive.

Comment s’en garder et «se garder!»

Comme l’enfant cité, nous devons définir une ligne de pensée et de conduite, qui nous amène à dire des «oui» et des «non»!

Ce faisant, nous demeurerons des êtres libres, et non des gens «conditionnés» et «manipulés» et ce, en tous les aspects de la vie.

Mais pour en revenir au «corps», la sagesse ne nous inciterait-elle pas à apprendre à nous accepter tels que nous sommes: grand, petit, mince, «enrobé», etc.? Tout en essayant d’améliorer ce qui peut l’être sans excès de scrupules ou de perfectionnisme…

«S’accepter tel que l’on est» et ne pas essayer de ressembler à tel ou telle ou à sacrifier aux modes changeantes… assure une paisible confiance en soi et un rayonnement amical.

«J’impose à mon âme le calme et le silence»,

cette décision de l’homme de la Bible définit une manière de penser et d’être, riche de bon sens et de maîtrise de soi.

Heureux ceux qui ont appris à donner la prééminence en toutes choses dans leur vie, à l’esprit, à l’âme, sans négliger leur corps.

Yvon Charles