«Un pêcheur m’a emmené relever des casiers aux Glénan, un jour de mauvais temps. Ce jour-là, j’ai compris que je serais marin!», se souvient Jean-François Barazer près de 50 ans plus tard. Rien ne le destinait à une telle vie sur les océans, puisque son arrière-grand-père a créé les ardoisières de Maël-Carhaix et que son père en a été le dernier propriétaire.
A 18 ans, Jean-François embarque donc sur un caseyeur, puis sur un chalutier en mer d’écosse. «On partait pour des marées de 15 jours. Dans les années 80, tant qu’il y avait du poisson à trier et à vider… on continuait. Nous pouvions faire 24 à 48 h sans nous coucher dans notre bannette quand il y avait un «coup de poisson». C’était dur, mais j’étais jeune et c’est ce que j’aimais faire!»
Il commence comme mousse, et va finir patron 10 ans plus tard, en passant différents brevets.
«C’était une époque où la pêche était une aventure complète, on faisait ce qu’on voulait et on décidait seul du lieu où on allait. C’est devenu de plus en plus contrôlé à cause de la raréfaction de la ressource.»
En 1993, alors que la pêche ne se porte pas bien, il reçoit une proposition comme second capitaine sur un navire océanographique en Mauritanie. Il va passer cinq ans dans ce pays marqué par une misère choquante, mais aussi par un respect et un sens de l’accueil rare. «Ils ont peu mais partagent beaucoup. J’ai découvert le désert où les paysages et les couchers de soleil sont inoubliables. Suivre des pistes ténues, au milieu des rochers et du sable, partager de la viande de chameau avec du pain cuit dans le sable, que de souvenirs!»
En 1998, il part en Nouvelle-Calédonie et commandera pendant 25 ans un autre bateau océanographique. «L’équipage comptait des Kanaks, des Caldoches, des Wallisiens… Mais tout le monde a cohabité, si bien qu’ils sont devenus pour moi comme une famille dont j’aurais été le père!»
Pendant ses congés, il s’engage pour des missions humanitaires ou scientifiques en Nouvelle-Guinée, à Madagascar, aux Philippines… En retraite forcée depuis novembre 2024 («Je me suis blessé, sinon j’aurais continué, c’est certain!»), il va tout de même continuer à naviguer, mais uniquement comme bénévole. Il compte aussi revoir ses amis en Mauritanie, qui espèrent sa visite depuis 25 ans.
Olof Alexandersson