Le jour où Thibaut a rencontré le golden retriever, devenu son chien d’assistance, sa vie a été transformée. Le garçon et le chien sont inséparables! Avant, chaque jour était un combat constant pour Thibaut. Les crises d’épilepsie se succédaient, elles arrivaient brusquement sans avertir, le déstabilisant complètement.

«Épileptique depuis la naissance, raconte-t-il à un journaliste, on m’a enlevé un quart du cerveau parce que j’avais une tumeur et c’est comme ça que les crises sont arrivées, il reste encore un peu de cette tumeur. Quand je fais une crise, je me mords les doigts, après je tombe par terre, je convulse, je crie, je pleure. Ce sont des crises assez fortes, puis, je me réveille et je ne me souviens plus qui je suis, où je suis. »

Malgré ses problèmes de santé, Thibaut s’accroche, travaille dur pour réussir ses études, mais la crainte de l’arrivée d’une nouvelle crise est toujours là, il n’est jamais tranquille. Puis, un jour, alors qu’il est déjà au lycée, il entend parler d’une association qui dresse des chiens pour accompagner des personnes souffrant de divers handicaps. Il voit tout de suite dans cette nouvelle une opportunité pour lui-même.

« … il m’a immédiatement adopté ! »

Il s’inscrit pour faire des stages dans cette association, et à la rentrée de sa terminale, après une série de démarches, il peut choisir un chien d’assistance qui l’accompagnera dans sa vie quotidienne. Des éducateurs sont là pour l’aider à choisir, car le choix du chien est une étape très importante qui détermine souvent la réussite ou l’échec.

Pour Thibaut, le choix se fait très rapidement. Un éducateur lui fait voir un golden retriever, nommé Olaf, et, comme il le raconte avec ses mots à lui, «ça a directement « matché ». Il est allé vers moi et aucune autre personne, donc il m’a immédiatement adopté.»

En effet, dès le début s’installe entre Thibaut et Olaf une grande complicité. Accompagné par son chien, l’adolescent se sent en sécurité. Lui-même ne discerne pas bien les signes avant-coureurs d’une crise d’épilepsie, mais dès que le chien aperçoit un certain comportement qu’on lui a appris à reconnaître, il se précipite vers son maître, et par des coups de museau contre sa cuisse et aussi des aboiements, il lui fait comprendre qu’il doit se coucher et aussi, si possible, avertir quelqu’un. Le jeune s’allonge alors, et le chien pose ses pattes avant et sa tête sur sa poitrine pour le plaquer au sol et ainsi empêcher des convulsions violentes. Il attend patiemment la fin de la crise, puis aide le jeune à se relever.

«Sa présence m’apaise beaucoup, raconte Thibaut. Si j’ai des vertiges, je sais qu’il sera là pour me rassurer et prendre soin de moi… c’est un ami fidèle qui me suit partout: au lycée, en stage, dans toutes mes activités sportives et culturelles. Il me comprend et sait me réconforter. Et maintenant, conclut Thibaut, je ne fais presque plus de crises d’épilepsie depuis cinq ans».

Des chiens formés pour apporter affection et sécurité

L’histoire de Thibaut et son chien n’est qu’un exemple parmi d’autres de ce qu’un chien peut apporter à une personne en situation de handicap.

C’est en regardant un programme à la télévision en 1989 qu’une professeur de biologie dans un lycée agricole d’Alençon, Mme Marie-Claude Lebret, découvre une autre facette de ce que des chiens, spécialement entraînés, peuvent apporter à ceux qui rencontrent diverses difficultés dans la vie. Un reportage réalisé aux États-Unis lui fait découvrir un nouveau type de thérapie, où ces compagnons à quatre pattes occupent une place essentielle dans la vie de beaucoup de personnes souffrant d’un handicap.

En France, on connaissait essentiellement l’aide précieuse apportée par des chiens guides d’aveugles, pour permettre aux non-voyants de se déplacer en sécurité… mais ici, il s’agit de chiens qui ont reçu une formation spéciale très poussée pour intervenir dans la vie quotidienne de personnes souffrant de divers handicaps mentaux ou physiques. Certains sont « spécialisés » pour assister des sourds. Réagissant à certains bruits familiers, ils jouent un rôle d’avertisseur pour attirer l’attention de leur maître en cas de danger, etc. D’autres ont suivi des « cours » pour apporter aux enfants autistes ou schizophrènes leur affection, devenant pour ces enfants le compagnon fidèle qui ne les abandonne jamais.

Pour Mme Lebret, cette émission ouvre littéralement une nouvelle perspective dans sa propre vie. Elle s’est presque sentie investie d’une « mission spéciale ». Elle continue certes son travail de professeur, mais au-delà de l’enseignement, elle veut créer une place pour ce type de formation canine dans son lycée. Lorsqu’elle en fait part au proviseur, celui-ci se montre tout de suite intéressé, ses élèves en biologie l’encouragent également, et elle part aux États-Unis pour découvrir sur place comment est organisé ce travail et pour suivre un stage.

Elle apprend combien l’éducation d’un tel chien est déterminante pour le rôle qu’il va jouer auprès du malade. D’abord, les éducateurs procèdent à un tri sélectif selon la qualité du pedigree de l’animal et aussi en observant son comportement.

Deux races sont privilégiées: le labrador retriever et le golden retriever. La formation de chaque chien dure deux années. D’abord, de 3 à 18 mois, le chiot est placé dans une famille où il va apprendre à se sociabiliser et aussi à faire face à toutes sortes de situations différentes de la vie quotidienne.

Il a appris à répondre à plus de 50 ordres différents

A l’âge de 18 mois commence ensuite une formation proprement dite dans un centre d’éducation où le chien doit apprendre à répondre à plus de 50 ordres différents. Il doit ainsi, par exemple, être capable d’ouvrir une porte, allumer la lumière, décrocher le téléphone, ramasser et rapporter des objets, alerter en cas de danger, etc.

Enthousiasmée par ce qu’elle a vu, Mme Lebret repart, déterminée à introduire en Europe cette méthode et convaincue du bien que de telles bêtes pourront apporter à beaucoup de personnes dans la souffrance.

Ainsi, l’association Handi’chiens est née et le premier centre d’éducation pour chiens d’assistance voit le jour en 1989, à Alençon, dans le cadre d’un projet éducatif du lycée agricole où Mme Lebret enseigne.

Depuis ces débuts, d’autres centres ont été créés dans diverses régions de France. En Bretagne, un tel lieu a vu le jour à Saint-Brandan, près de Saint-Brieuc, en janvier 2003.

En 2010, l’association Handi’chiens reçoit le prix spécial du jury Autonomic Innov, un prix qui récompense les principales innovations pour améliorer la qualité de vie de personnes en situation de handicap et des personnes âgées dépendantes.