Osera-t-on parler aujourd’hui encore de «conscience» dans un monde où le mensonge règne et s’étend, d’autant plus que les médias, si présents, le propagent eux aussi !
Même si je ne partage pas la conclusion de ce journaliste célèbre: «Tout le monde ment toute la journée»,
car je connais des hommes et des femmes de tous âges qui ne mentent pas, et certains qui ne le feraient pas, dussent-ils en être très pénalisés! il n’en demeure pas moins que la duplicité, l’hypocrisie, la tromperie… le mensonge sous toutes ses formes sont très répandus !
Alors, parler de «conscience», ne serait-ce pas anachronique ou… ridicule?
Eh bien, non!
En ce XXIe siècle, il est des hommes et femmes de toutes conditions, de toutes cultures, et je le crois, de tous pays, qui feraient écho à la réflexion d’Emmanuel Kant, qui écrivait il y a plus de deux siècles:
«Deux choses remplissent le cœur d’une admiration et d’une vénération toujours nouvelles et croissantes à mesure que la réflexion s’y attache et s’y applique:
le ciel étoilé au-dessus de moi et la loi morale en moi».
Sans nous arrêter aujourd’hui sur la première partie de cette parole du grand philosophe, notons l’importance essentielle qu’il porte à «la loi morale en lui».
La conscience, car il s’agit bien d’elle, ressurgit parfois au cours de conversations, tels des jugements sans appel! comme:
–«Celui-là ? Il a une conscience élastique».
Trait d’humour qui veut dire beaucoup sur la fiabilité des allégations et le comportement de la personne dont il est question!
–Ou pire encore: «Celle-là, elle n’a pas de conscience!», conclusion définitive, et mise en garde à peine voilée.
On pourrait citer d’autres expressions qui tendraient à prouver que la notion de «conscience» existe encore… mais n’est-ce pas plutôt son absence ou son altération qui sont soulignées plus que sa présence rassurante?
Autrefois, dans les écoles, ce que l’on appelait «les cours de morale» éveillaient les enfants à la notion du bien et du mal…,
et quelque limitées ou même parfois subjectives qu’elles soient,
ces exhortations à ne pas mentir, ne pas tricher,
à ne pas voler,
ne pas être violent,
à ne pas user de sa force contre le plus faible…
mais à respecter les autres et ce qu’ils possèdent,
à être «poli», à saluer,
à remercier, etc.,
à obéir aux parents et aux enseignants, etc.,
ces exhortations et les exemples souvent très réalistes présentés, avaient une certaine influence sur la pensée et la manière de vivre des individus de tous âges!
D’aucuns ont «jugé» (!) que cela était aliénant, et conditionnait les êtres humains, les amenant à une dépendance néfaste des autorités diverses et des pouvoirs… et donc ils ont insisté pour que soient supprimés les moments de «morale» à l’école! et… les résultats ne se sont pas fait attendre. Et dans les cours de «récré» comme dans la rue, et dans la vie des adultes, s’est à nouveau imposée «la loi de la jungle», ou plutôt l’absence de lois et de repères…
Ne reste alors que la répression pour tenter d’endiguer les débordements et abus en tous genres.
Mais même la simple punition est devenue suspecte, et pour ceux qui veulent en finir avec toutes bases morales, toutes punitions et même toute simple réprimande, c’était encore trop, et attenter à la personnalité.
Les conséquences de cet état d’esprit et du «laisser-aller» qu’il entraîne sont évidentes:
dans certaines familles,
dans certaines écoles,
dans certains lieux,
et dans une partie de la société…,
la vie est devenue très difficile…
Certains ont voulu caricaturer ces nouveaux comportements en des raccourcis évocateurs, tels:
«Avant on apprenait aux enfants et aux jeunes à aider les vieux, à porter le sac de la vieille dame, maintenant ils lui «piquent» son argent en la bousculant…»
Ce n’est heureusement pas toujours ainsi, mais trop souvent la réalité s’en rapproche.
Paul, l’apôtre, parlant de la conscience, écrivait que «tour à tour elle nous accuse ou nous défend»…
Il y a donc bien en l’homme, comme E. Kant le déclarait en s’examinant lui-même, «un arbitre», que le Créateur a placé…
Cette voix intérieure est loin d’être infaillible.
Elle dépend aussi de l’éducation reçue, du milieu de vie, des exemples donnés, encourageants ou hypothéquants, et de bien d’autres influences… mais elle existe et se manifeste au plus profond de l’être.
Paul révèle que, «au dernier jour», celui du grand jugement, tout cela sera mis en lumière.
Le Créateur «du ciel étoilé», et de toute l’extraordinaire création, qui émerveillait le philosophe –et toute personne qui la considère avec attention– est aussi celui qui a créé l’être humain «à son image», et attend de lui une reconnaissance et une existence digne de sa vocation.
Yvon Charles