La Mode mondialisée du jean délavé tue…
Interdite en Europe, et en Turquie depuis 2009, la technique de délavage du Denim par pulvérisation à haute pression de sable ou de silice, continue à faire des victimes dans d’autres pays lointains. Là-bas, de jeunes ouvriers et ouvrières de l’industrie du textile meurent de la silicose.
En 2007 puis en 2011, une équipe médicale turque a étudié la prévalence de cette grave maladie des poumons parmi 145 puis 83 travailleurs du textile. Dans cet inter-temps, malgré un arrêt de leur exposition à cette technique de sablage, tous ont été atteints par la silicose et neuf en sont morts, entre 18 et 29 ans…
Chez les survivants, la prévalence de la maladie était passée de 55,4% à 95,9%, et une perte fonctionnelle de la capacité pulmonaire était notée dans 66% des cas.
Au Bangladesh, pays dont 83% des exportations dépendent du «prêt-à-porter», les pratiques commencent à évoluer.
Marqué en 2013 par la tragédie du Rana Plaza (1127 morts dans l’effondrement d’ateliers textiles) et frappé par une pollution des eaux due aux résidus chimiques –notamment le chlorure utilisé pour blanchir le jean– le Bangladesh a vu plusieurs de ses «géants» du secteur investir dans des procédés de décoloration moins nocifs, tel le laser…
Cependant, la rivière Buriganga, qui traverse la capitale Dacca restera probablement encore longtemps classée parmi les cours d’eau les plus pollués du monde, et la silicose continuera longtemps à faire de jeunes victimes…
Or, il suffirait d’une mesure toute simple pour mettre fin à ce scandale sanitaire. Et celle-ci peut se décider ici et maintenant, dans nos pays occidentaux: interdire la vente de jeans délavés… pour sauver des milliers de vies humaines!
Mais voilà: l’emprise de la Mode –de toutes les modes– sur les esprits et les mœurs semble interdire ce genre d’interdiction. Et il est des combats dont l’ampleur décourage par avance qui les envisage…
Car les indignations collectives sont parfois bien sélectives: il est des scandales qui dérangent trop et sur lesquels la majorité silencieuse préfère fermer les yeux… Il en est qui arrangent et que l’on se plaît à dénoncer. Ainsi va le monde…
Pourtant, il est possible de remuer des montagnes, comme le montrent les décisions récentes –et encore bien trop timides– prises par deux grands groupes de Luxe pour combattre les ravages de l’anorexie parmi les mannequins et les diktats de maigreur qui leur sont imposés par des couturiers, aussi exploiteurs que les «grands patrons» du textile dans les pays pauvres.
Une Mode qui tue des enfants mériterait-elle donc de survivre ?