«Chacun doit s’y sentir comme chez lui, avec ses repères, ses habitudes, etc., tout en étant transporté dans un établissement médical qui lui apporte de la sécurité».
Ainsi pourrait se définir la ligne de conduite au sein de l’Ehpad de Kersalic. Et dans un contexte encore marqué par les révélations de dérives éthiques et sanitaires chez certains acteurs de la profession, l’établissement semble faire figure de précurseur. En effet, la démarche engagée depuis maintenant de nombreuses années porte ses fruits et suscite l’intérêt de ceux qui en entendent parler. En témoignent les près de deux cents personnes inscrites sur la liste d’attente, espérant pouvoir intégrer un jour cette structure «pas comme les autres».
Situé dans une commune de l’ouest des Côtes d’Armor, l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes a connu une véritable métamorphose en l’espace de dix ans. En effet, à Kersalic, toute l’organisation de l’Ehpad est désormais pensée en fonction de ses « habitants ». La structure et le personnel s’adaptent aux résidents et non l’inverse. Ce qui implique une très grande souplesse dans la gestion quotidienne de l’établissement. Il n’est plus question d’imposer des heures et des activités aux « habitants » mais de s’adapter à toutes les situations. Cela afin d’aider chacun à vivre le mieux possible ses dernières années de vie.
L’Ehpad est aménagé de façon à reproduire un bourg tel que pouvaient le connaître les anciens avant de rejoindre l’établissement. Chaque couloir porte le nom d’une rue de la commune. La place centrale du bourg y a été reproduite, de même qu’un bureau de poste, un café, une boutique, un cinéma ou encore un restaurant ouvert au public. Dans les couloirs, chaque appartement est équipé d’une boîte aux lettres, d’un paillasson et d’une large fenêtre dotée de volets, que le résident ferme chaque soir comme il l’aurait fait auparavant. Même les animaux des résidents sont acceptés.
Enfin, un autre principe très simple guide l’établissement : chaque personne âgée a un potentiel physique et cognitif qu’il faut entretenir le plus longtemps possible, en fonction des possibilités de chacun, bien sûr! Par exemple, en débarrassant et en essuyant la table, en préparant le repas avec les soignants, en pliant le linge propre, en distribuant le courrier, etc.
Les résidents sont considérés avant tout comme des habitants. D’ailleurs, ils élisent leur conseil municipal que préside le maire, qui n’est autre que la directrice. Véritable lieu de rencontre intergénérationnel, l’Ehpad accueille notamment des actifs qui partagent le déjeuner avec les anciens et reçoit des enfants qui y réalisent des activités, pour la plus grande joie des personnes âgées.
Dans une société où la rentabilité économique et la recherche du profit prennent trop souvent le pas sur l’humain, parfois jusque dans les Ehpad…, il est heureux de constater que plusieurs n’ont pas oublié «qu’on ne soigne bien qu’avec le cœur».
J.G.